Un blog pour un grand évènement...

Ce blog a été crée dans le contexte de la fête de la science qui se déroulera du jeudi 21 au dimanche 24 octobre 2010 à l'université de Nîmes (site des Carmes).

Nous, Cassandre DEWINTRE, Claire MAGAUD et Karim KADIR, tous trois doctorants en géographie rattachés au laboratoire ART-Dév du CNRS, avons décidé de traiter de la thèmatique de "la ville durable" reliant nos projets de recherche respectifs.

Ce travail sera l'occasion de faire découvrir au grand public les notions clefs du concept de ville durable via différents documents du blog et animations sur le site des Carmes.

Bonne lecture à tous...

Le périurbain, un territoire durable?


I)L’importance du milieu urbain


Il y a aujourd’hui, rassemblés dans les villes du monde, davantage d’habitants qu’il n’y avait d’êtres humains sur l’ensemble de la planète en 1950 ! La ville se métamorphose et sa périphérie évolue. En l’an 1900, 10 % de la population vivait en ville ; en 2000, 50 % et en 2025, il s’agira de 60 %. Porté par la mondialisation économique et culturelle, par la diffusion de technologies nouvelles et de mobilités inédites, l’accroissement urbain du XXe siècle est d’une tout autre ampleur que la croissance engendrée par la révolution industrielle au siècle précédent. Il ouvre la voie vers une nouvelle civilisation urbaine.

L’urbanité qualifie, au sens géographique du terme, l’ensemble des représentations liées à la représentation de ce qui est urbain. Elle se définit donc essentiellement par opposition à la ruralité des campagnes (ce terme qualifie parfois simplement « ce qui est rural »). Pendant longtemps, l’urbanité était connotée positivement : elle représentait le dynamisme qui tranchait d’avec la torpeur des campagnes, la modernité qui s’opposait à la tradition, le changement à l’immuabilité... Aujourd’hui les aspects caricaturaux des ces perceptions tendent à s’effacer et l’urbanité si elle conserve son pouvoir d’attraction dans les pays du Sud, semble au contraire dans les pays industrialisés, avoir partiellement perdu de son attrait au profit des valeurs rurales, considérées comme plus authentiques.

L’extension du fait urbain est aujourd’hui un phénomène planétaire qui se traduit par l’augmentation de la part des citadins dans la population mondiale. Elle résulte notamment du développement des périphéries urbaines qui repousse la limite entre espace urbain et espace rural. Marqués par des caractères, des fonctions ou des besoins communs, les espaces urbains recoupent cependant des réalités géographiques différentes qui rendent fort difficile la formulation d’une définition précise de la ville.

Le nombre d’urbains augmente mais il faut être attentif au chiffre choisi pour définir cette augmentation, en effet de quels urbains parlons nous ? S’agit-il de ceux qui vivent dans les agglomérations, de ceux qui y travaillent, ou encore de l’ensemble des populations qui se rapprochent des villes ?

S’il est vrai que les populations sont de plus en plus concentrées autour et dans les villes, est-il vrai que leur demande est uniquement urbaine ? B. Hervieu et J. Viard relativisent cet engouement « Les pôles urbains qui regroupèrent en 1975 jusqu’à un maximum de 62,5 % de la population, sont depuis touchés par une légère décrue : 60 % seulement de vrais urbains au tournant du siècle » . Le phénomène de croissance urbaine est une réalité qu’il convient de nuancer et d’adapter au territoire donné. Il existe différents processus qui ont découlé de la croissance urbaine.

C’est ainsi que le défi urbain, qui engendre la mutation des territoires urbains et des territoires ruraux, est une des grandes questions de la période contemporaine. La croissance urbaine a engendré de nombreux processus de mutations des territoires (gentrification, périurbanisation, gated-communities...).

Du grec peri (autour) et du latin urbanus (de la ville), son existence n’étant liée qu’à la présence de cette dernière, le périurbain se définit donc par tout ce qui est autour de la ville. Le phénomène de périurbanisation concerne un espace géographique défini en fonction d’une ville qui s'étend par son bâti, par son pôle d’emploi, ses dynamiques culturelles.... Cette notion apparue dans les années 1970 est l’un des grands processus de recomposition des territoires issus de la croissance urbaine.


Ce phénomène a été favorisé par quatre facteurs essentiels :

-Les politiques concurrentielles d’attractivité engagées par les villes et les agglomérations (qui cherchent ainsi à augmenter leurs entrées financières par les taxes professionnelles) encouragées par des subventions régionales et nationales
-Les politiques agricoles qui ont encouragé l’intensification et l’exode rural
-Les politiques routières qui ont favorisé le « tout voiture », l’accès aux villes et aux grandes agglomérations, la construction d’un tissu urbain lâche mais très irrigué par les routes.
-Les politiques du logement de l’après-guerre en France (banlieue HLM...) puis les politiques favorisant l’accès à la propriété (loi Loucheur)

Le processus de périurbanisation s’adapte et se définit en fonction d’un territoire donné et d’une dynamique territoriale. Il découle d’un processus général et se développe selon des données géographiques, politiques, économiques locales. La périurbanisation entraîne des notions politiques, économiques, urbaines mais aussi spatiales, frontalières…

II)Qu’est-ce que le périurbain ?

Il y a peu de temps encore la différenciation entre l’espace urbain et l’espace rural était établie à partir de critères de densité de population. Était considérées comme urbaines toutes les zones rassemblant plus de 2000 habitants agglomérés et donc rurales toutes les zones de moins de 2000 habitants agglomérés.
Cependant le phénomène de périurbanisation a rendu caduque cette définition. En effet de nombreuses communes proches d’une ville, appelées couramment cités-dortoirs, n’atteignent pas cette limite mais sont néanmoins en grande partie dépendantes de la ville au niveau de l’emploi notamment. C’est sur ces critères que s’est basée la nouvelle nomenclature de l ‘INSEE. On parle maintenant d’Aire Urbaine et d’espace à dominante rurale. « Une aire urbaine est un ensemble de communes d’un seul tenant et sans enclaves constitué par :

-Un pôle urbain, qui est une unité urbaine offrant au moins 5000 emplois et n’étant pas elle-même attirée à plus de 40 % par une autre commune urbaine.
-Une couronne périurbaine composée de communes dont 40 % de la population résidente possédant un emploi travaille dans plusieurs Aire Urbaine »

« Les espaces à dominante rurale, sont les communes dont moins de 40 % de la population active travaille dans une Aire Urbaine. Ils peuvent à la fois comporter des communes rurales au sens de l’ancienne définition (moins de 2000 habitants agglomérés) et des petites villes offrant moins de 5000 emplois (elles sont appelées des pôles d’emplois de l’espace rural). »

Identification d’un espace périurbain

De La ville durable

De La ville durable

Identification d’une commune rurale, et d’une commune périurbaine à partir d’une carte topographique de l’IGN au 1/25 000


La carte topographique est un premier élément permettant à un géographe d’identifier un espace périurbain, urbain ou rural. Ex: Pompignan est un « village en étoile » entouré de parcelles à vocation agricole. Le centre ancien reconnaissable à sa densité ne s’est pas étendu, il n’y a pas de constructions en dehors du centre du village. Cette commune à un caractère rural.

Quant à Prades-le-Lez, l’extrait choisi ne montre pas la proximité de la ville de Montpellier, un élément permettant de justifier la qualité périurbaine d’une commune. Mais en dehors de celui-ci, l’extension des constructions pavillonnaires autour du centre historique (dense sur la carte et situé près des axes de communication) est un élément probant du caractère périurbain de la commune.
Cette analyse sommaire permet de présager l’identité d’une commune. Celle-ci doit bien sûr être complétée par un travail de terrain ou des critères tels que ceux de l’INSEE.

On constate une extension des villes sur les campagnes environnantes et à proximité des villes selon une « vague d’urbanisation » à laquelle on assiste depuis une quarantaine d’années. Ce développement à la périphérie des villes a été qualifié de « périurbanisation » et les espaces sur lesquels il s’est développé ont été désignés sous l’appellation d’espaces périurbains. « Littéralement tous les espaces situés « autour » de la ville . De formation récente (quelques décennies pour certains, quelques années pour d’autres) et surtout en mutation permanente, ce type d’espaces appelle donc beaucoup de questionnements quant à la compréhension des mécanismes qui ont permis et permettent sa genèse, quant à son évolution dans le temps, quant à la vitesse et à l’intensité de la propagation de cette « onde d’urbanisation » et de toutes les transformations qu’elle engendre.

Extrait d’un travail de recherche mené au cours de l’année 2008 et ayant pour objectif d’appréhender la part de ruralité et d’urbanité des communes périurbaines. Ce travail avait une double entrée : les formes urbaines et les étapes de croissance de la commune ainsi que les populations. Comment les populations perçoivent-elles leur commune ?

Nous partons de l’hypothèse que les communes périurbaines ont des caractéristiques communes. C’est alors que des territoires ruraux sont devenus des espaces périurbains ou rurbains. Si une commune devient périurbaine, l’urbanité de la ville-centre s’y diffuse et celle-ci tend à devenir une commune urbaine. Mais si le territoire « résiste » et s’ancre à son passé rural, la périurbanisation devient un moyen de valoriser le territoire en acceptant une part d’urbanité.

Ce travail de recherche s’intéresse donc à la périurbanisation qui sera notre thème d’étude avec une problématique liée à la question d’urbanité et de ruralité des populations et des territoires choisis. Quelle ruralité et quelle urbanité pour ces territoires nouveaux alliant une histoire « rurale » à une croissance urbaine ? Quelles sont les demandes des populations ? La distance à la ville centre joue-t-elle un rôle important dans la dynamique territoriale ? et dans la structure de la population ?

Qu’est-ce qu’engendre le périurbain sur les territoires ? Est-ce de nouveau territoire à part entière ou une étape obligatoire qui conduira l’ancien rural à être le nouvel urbain ?

Saint-Gély-du-Fesc est une commune située dans la région Languedoc-Roussillon et dans le département de l’Hérault à moins de 10 kilomètres de Montpellier. Elle est limitée au Nord par la commune des Matelles ; à l’Est et au Sud par la commune de Saint-Clément-de-Rivière et à l’ouest par la commune de Combaillaux. Saint-Gély-du-Fesc se situe sur le canton des Matelles. C’est un canton de 14 communes qui s’étend sur 18 800 hectares soit 3,8 % du territoire départemental.

Saint-Gély-du-Fesc après une brève appartenance à l’agglomération de Montpellier fait partie aujourd’hui de la communauté de commune du Pic Saint-Loup, créée en novembre 2002 et composée de 17 communes, qui s’étend sur 25 000 hectares avec une population de 34 000 habitants. Sa sortie de l’agglomération implique une position forte de la part de Saint-Gély-du-Fesc quant à l’agglomération de Montpellier.

De superficie moyenne (16, 51 km2) mais très densément peuplée (461 hab./ km2) la commune de Saint-Gély-du-Fesc comptait 594 habitants en 1964 et en compte aujourd’hui environ 8500 d’après les estimations municipales. Son territoire de 1645 hectares est décomposé en 594 hectares de terres agricoles, 450 hectares sont classés en site protégé et 599 hectares en terres construites ou constructibles.
Son développement urbain et démographique est dû à la proximité de Montpellier, aux avantages naturels de la zone Nord de la ville et aux opérations d’aménagements des années 1960 qui ont placé les universités, les hôpitaux et les centres de recherche au Nord de Montpellier. Les terres agricoles ont très peu de valeur économique pure.

La maison individuelle, la forme urbain marquante du périurbain

De La ville durable

Saint-Gély-du-Fesc – Suprématie de la maison individuelle, Claire Magaud, juin 2008

De La ville durable

Saint-Gély-du-Fesc– Lôtie ou non, la maison individuelle reste la forme urbaine la plus répandue - Claire Magaud, juin 2008

De La ville durable

La vigne a laissé place au bâti et aux populations urbaines

La commune de Lauret est située dans le département de l’Hérault à 30 kilomètres au Nord de Montpellier, après Saint-Mathieu de Tréviers sur la route de Quissac. Elle est située sur le canton de Claret et fait partie de la communauté de commune de l’Orthus.

La commune est limitée au Nord-Ouest par le rocher du Causse de l’Orthus, à l’Ouest se découvre le paysage du Pic Saint-Loup. À l’Est et au Sud, Lauret est limitrophe avec la commune de Valfaunès, à l’Ouest avec la commune de Sauteyrargues et au Nord avec la commune de Claret.

Lauret est une commune de petite superficie (6,7 km2) avec une densité de 63, 7 habitants/ km2 en 1999, qui est passée aujourd’hui à 88,5 habitants/ km2. Lauret comptait 169 habitants en 1982 et en compte 549 en 2008.

Les espaces « naturels » occupent environ la moitié de la surface communale (d’après le diagnostic territorial de PLU de la commune). Ils correspondent aux collines et aux plateaux marneux et calcaires où dominent les garrigues et les bois. Les terres agricoles occupent près de la moitié de la surface de la commune. La vigne prédomine dans cette plaine composée d’alluvions et de marnes.


De La ville durable

Lauret depuis le Rocher du Causse

De La ville durable

Lotissemnet de la Longarède

III) Eléments de conclusion


C’est ainsi qu’il semble plus juste de parler de Saint-Gély-du-Fesc comme d’une commune périurbaine, son environnement n’étant pas celui d’une ville en tant que telle. Son territoire est plus urbain que rurbain, la part de ruralité étant absorbée par une urbanité dominante. Saint-Gély-du-Fesc, en augmentant son parc résidentiel peuplé de ménages souvent originaire de la ville, a « choisi » de se tourner vers un mode de vie plus « citadin ». Cette croissance a altérer le paysage rural de la commune. Bien que les ménages enquêtés n’aient pas le sentiment de vivre dans une commune située dans une zone rurale, l’interface rurale n’a pas totalement disparu et les fêtes qualifiées de « fêtes de village » en sont peut être une preuve. Saint-Gély-du-Fesc devient de plus en plus résidentielle et on peut se demander si ce processus d’étalement va s’arrêter aux limites communales où s’il va s’étendre jusqu’à Montpellier pour se fondre dans un « tout urbain » ?
Malgré tout, le vocabulaire et par le pouvoir municipal met en évidence le basculement identitaire de la commune. C’est ainsi que lorsque les populations parlent de Saint-Gély-du-Fesc, elles emploient rapidement le terme de village pour l’abandonner au profit du terme de « ville » en le relativisant par sa petite taille ou par son développement à venir. On peut penser que la commune se déracine pour se ré-enraciner dans une dynamique urbaine.

Si le caractère rural émerge la part urbaine de la commune de Lauret s’annonce par le bâti et par les nouvelles populations porteuses d’une idéologie plus urbaine (association, protection de l’environnement, recyclage...).

La périurbanisation permet à l’urbanité de se diffuser à l’échelle de l’Airte urbaine, cette urbanité est reçue et se métamorphise de manière spécifique dans chacune des communes périphériques. Les ménages périurbains se réfèrent à leur lieu de vie pour définir leur sentiment d’appartenance, la présence de la ville-centre n’est pas occultée, les associations, les solidarités sociales contre la ségrégation sont bien présentes dans ces communes. Le souhait de s’identifier et de se regrouper est fort. Les communes périurbaines ne semblent pas suivre une schéma type, elles sont un mosaïque de problématiques locales. Le maillage territorial est alors divers, la périurbanisation est une thématique importante dans l’aménagement du territoire.

IV) Le périurbain est-il une composante de la ville de demain ?


Dans l’idée d’une propagation d’une vague urbaine, chaque commune tente de faire émerger son identité indépendamment de la ville-centre, qui semble finalement peu importante pour les populations. Ce travail de recherche est bien sûr lié aux perspectives futures de transformation de l’urbain et de l’urbanité.

Comment la ville dense d’une part, et les espaces périurbains d’autres part sont-ils appelés à évoluer ? La ville va t-elle continuer à s’étaler ?

Les espaces à vocation rurale en périphérie de la ville vont-ils devenir les « poumons verts » de celle-ci ou un nouvel espace à conquérir ?

Après une accalmie à la fin des années 1980, le processus de périurbanisation a repris de la vigueur depuis les années 1990. Dans la région de Montpellier, le développement continu des infrastructures routières de desserte des espaces périurbains- réalisation du L.I.E.N (Liaison Intercommunal d’Évitement Nord) , le contournement des communes, la multiplication des ronds points fluidifiants de trafic, extension des zones de lotissements sur des communes de plus en plus éloignées de la ville-centre – laisse à penser que l’étalement urbain serait à même de se poursuivre quelques années ou encore quelques décennies.

Cependant certains facteurs ne vont pas dans ce sens – la hausse du carburant contraignant les populations à ne pas trop s’éloigner de la Montpellier, le prix du foncier, l’aspect ségrégatif de certaines communes, la densification et le renouvellement urbain de la ville-centre. On peut envisager que des communes à proximité de Montpellier comme Saint-Gély-du-Fesc deviennent des quartiers de celle-ci.

Claire Magaud, ART-Dév/CNRS/UM3.